Jacinthe Robillard - Directrice de plateau

Publié le 6 mars 2024

QUELLE EST TA FONCTION ? COMMENT DÉCRIRAIS-TU TON TRAVAIL ?

Je suis directrice de plateau en variétés. C’est un poste qui est central, puisque je coordonne l’équipe sur le plateau avec l’équipe de la régie. Je suis les yeux, les oreilles, et la voix de l’équipe de réalisation sur le plateau et je travaille étroitement avec le-la réalisteur-rice et l’assistant-e réalisteur-rice

C’est un métier vraiment le fun qui n’est pas fait pour tout le monde mais qui est vraiment trippant ! Moi c’est en voyant la régisseuse Jenny Tessier à l’œuvre, lorsque j’assistais à un show de Patrice L’Écuyer avec ma mère, que j’ai eu le goût de faire ce métier. J’ai d’ailleurs eu l’occasion récemment de la remercier de m’avoir aiguillé. 

Il faut aimer discuter avec les gens et apprendre d’eux. 80 à 90 % de la job c’est de la relation publique. Ça demande aussi une grande écoute, mais pas juste avec les oreilles ! Il faut avoir un sens de l’observation, pour savoir quand les équipes sont en train de travailler et quand elles sont prêtes sans toujours être en train de le demander. C’est important de comprendre ce que chacun fait sur le plateau, ça vient enrichir la qualité de ton travail.

On peut parfois prendre des décisions, faire des suggestions à la réalisation pour faciliter le déroulement des choses.  Un bon régisseur a toujours un ou deux coups d’avance, on sait toujours ce qui s’en vient après. 

On a aussi le privilège de pousser la personne dans la lumière et de les accueillir en sortant de scène, ça nous fait partager des moments remplis d'humanité à chaque fois.

QUEL ASPECT DE TON TRAVAIL AIMES-TU LE PLUS ?

Sans hésitation, l’humain !  

Je suis une passionnée de faire la télé. Ce qui m’anime et me nourrit vraiment beaucoup c’est le contact avec les autres. J’aime échanger, poser des questions, comprendre les processus de création, observer les gens travailler, leur passion et leur implication me fascine !

J’aime aussi planifier et organiser, alors avoir un ou deux coups d’avance c’est assez naturel pour moi.

 

QUEL EST, SELON TOI, LE PLUS BEAU PROJET SUR LEQUEL TU AS TRAVAILLÉ ?

J’ai beaucoup de difficulté à répondre à cette question, parce que chaque projet est une expérience extraordinaire que je n’imaginais pas vivre. 

Que ce soit les projets avec Patrimoine canadien, avec Ricardo, sur Dans les médias, Prière de ne pas envoyer de fleurs ou Génial!, ce sont des histoires de rencontres et de moments très forts et assez uniques. 

J’ai fait ma carrière en majorité sur des remplacements et ça m’a offert de vivre les choses intensément sur de courtes périodes.

 

AS-TU UNE ANECDOTE INSOLITE LIÉE À TON TRAVAIL À PARTAGER ?

J’en ai plein et je me sens vraiment chanceuse ! Mais un de mes plus beaux moments reste la fête du Canada en 2017. Un grand spectacle était en préparation pour souligner le 150ème anniversaire de la Confédération et on recevait des invités spéciaux sans savoir qui.  C’est un article de La Presse qui m’apprend quelques heures avant que U2 sera de la partie. Je suis une fan depuis que j’ai 10 ans, je rêvais qu’ils viennent chanter dans ma cour à ma fête, et là c’est moi qui vais les faire rentrer sur scène ! 

Bono et The Edge passaient juste après le discours de Justin Trudeau, et Bono avait préparé un texte en français qu’il allait dire juste avant de chanter. Quelques minutes avant de monter sur scène il m’a demandé s’il pouvait me lire son texte pour savoir si tout était correct, donc moi grande fan je me retrouve épaule à épaule en coulisses avec Bono qui me lit son mot dans l’oreille, je vois son écriture sur ce petit carton, c’était énormément d’émotions. 

Je lui ai ensuite demandé s’il pouvait me donner son carton en sortant de scène, que ça représentait beaucoup pour moi. J’ai vu son visage changer quand il a compris que j’étais comme il a dit une "hardcore fan" et il m’a introduit à The Edge. Tout ça n’a duré que quelques minutes mais je le porte en moi pour toujours. C’est un rêve d’enfant qui s’est réalisé, alors n’ayez pas peur de rêver grand !

QU'est-ce que vous apporte le rôle de formatrice ?

On parle beaucoup du cinéma quand on évoque nos métiers moins de la télé, alors quand on m’a proposé d’être formatrice à l’AQTIS 514 IATSE  j’ai tout de suite vu l’occasion d’être un porte-voix pour ce milieu que j’affectionne.

 

L’enseignement ça me fait me sentir utile. Que ce soit à l’école des médias de l’UQAM ou à l’institut Grasset, où je suis chargée de cours, ou à l’AQTIS 514 IATSE où je donne la formation Initiation à la Vie Associative, je trouve intéressant d’accompagner des gens qui veulent faire un métier qui n’est pas facile. 

 

C’est important de partager au monde la réalité de notre univers pour qu’ils soient outillés en partant. Être pigiste dans le milieu des médias c’est extrêmement difficile et c’est important qu’on se le dise ! 
Malgré ça je reste optimiste, depuis 20 ans j’ai rarement manqué de travail même si je n’ai pas toujours fait des salaires faramineux à chaque année. J’ai toujours eu quelque chose d’autre à côté dont l’enseignement et ma pratique artistique.

Je dis tout le temps de ne pas attendre chez vous que le téléphone sonne, c’est précieux et fondamental pour continuer dans ce métier. Il ne faut pas qu’il y ait que le travail, il faut qu’il y ait autre chose pour que les mois où le téléphone sonne moins, vos autres intérêts prennent le dessus. 

«La qualité première pour travailler en télé, c’est d’aimer travailler en équipe. ça prend aussi une grande humilité, pour qu’un show roule il faut qu’on soit tous ensemble. Les uns sans les autres, ça ne donne rien. »
Jacinthe Robillard

QUEL AVENIR IMAGINES-TU POUR LA PROFESSION ?

Les métiers dans notre secteur évoluent avec la technologie, mais on est des humains qui coordonnons d’autres humains donc on sera toujours les yeux, les oreilles et la voix de la réalisation qui est hors du plateau. C’est plutôt la façon de tourner qui évolue et influe sur notre façon de faire. 

Je crois que la télé est là pour rester, même si elle évolue à travers les époques et qu’elle peut être malmenée, elle s’adapte et a toujours sa place dans la vie des gens.

 

SELON TOI, QUELLE EST LA FORCE DE L’INDUSTRIE AUDIOVISUELLE AU QUÉBEC ?

On n’a rien à envier aux autres ! On produit beaucoup, on a une expertise qui est reconnu à l’international et j’ai eu l’occasion de le vivre en travaillant avec des équipes notamment en Europe.

Je ne dis pas qu’on est les meilleurs ou les seuls mais notre force est installée. On a des conditions de travail qu'il n'y a pas ailleurs, on s'implique pour les améliorer et ça en inspire d'autres.