Lorette LeBlanc - Scripte
Publié le 1 février 2023
QUELLE EST TA FONCTION ? COMMENT DÉCRIRAIS-TU TON TRAVAIL ?
Je suis scripte et je travaille principalement sur des fictions. J’ai comme mandat de veiller à la continuité et aux raccords d’un film. Les départements, tels que Coiffure, Accessoires, Éclairage et Maquillage, sont tous responsables de leur propre continuité, le scripte agit comme un filet de sécurité et s’assure que ces éléments sont cohérents tout au long du tournage. Autrement dit, je suis la mémoire vivante d’un film.
En tant que garante de la cohésion visuelle et sonore d’une production cinématographique, je dois me souvenir de chaque détail du scénario et rapporter la moindre incohérence au réalisateur avec tact et diplomatie. Le tournage de plusieurs scènes différentes en une journée peut s’avérer un véritable casse-tête. C’est donc primordial pour le scripte de tenir le réalisateur et les comédiens informés en tout temps des plans et des détails importants.
QUEL ASPECT DE TON TRAVAIL AIMES-TU LE PLUS ?
La partie la plus intéressante de mon travail est au niveau de la réalisation. J’aime aider à raconter l’histoire et repérer des détails qui ne semblent peut-être pas pertinents au premier abord, mais qui sont incontournables pour enchainer les séquences avec cohérence. Par exemple, si l’état d’âme des comédiens ou le rythme des dialogues n’est pas le même dans la scène précédente, le manque de fluidité se fait ressentir au montage final. On veut éviter que cela ne se produise. Rien ne doit échapper aux scriptes ! C’est leur sens de l’observation aiguisé et leur mémoire infaillible qui font en sorte que les raccords entre les scènes passent inaperçus.
AS-TU UNE ANECDOTE INSOLITE LIÉE À TON TRAVAIL À PARTAGER ?
L’été dernier, j’étais en Colombie pour travailler sur un film d’action américain. Lors du tournage d’une scène, on a constaté que le personnage principal incarné par Omar Sy ne pouvait pas transporter son fils endormi et tous ses bagages dans une voiture sans l’aide d’une autre personne. Il fallait donc vite introduire un nouveau personnage au scénario pour répondre à cette problématique. À ma grande surprise, le choix s’est reposé sur moi. Comme le personnage d’Omar Sy était un espion international, le réalisateur a décidé que je serais son contact franco-canadien. Mon rôle était simple : l’accueillir et lui filer un coup de main avec ses bagages dans cette scène. Étant donné que notre dialogue était en français, le réalisateur a demandé qu’on se fasse la bise avant de se quitter. Enfin bref, tout ça pour vous dire que j’ai embrassé Omar Sy !
QUEL AVENIR IMAGINES-TU POUR LA PROFESSION ?
Contrairement aux autres métiers plus techniques, le métier de scripte n’a pas vraiment été impacté par l’avancement technologique. Même si l’arrivée de la tablette tactile a allégé et facilité quelques tâches, elle a tout de même ses limites. J’ai donc toujours plusieurs exemplaires du scénario en papier et des crayons sur moi, car ils demeurent une valeur sûre. Les appareils et outils numériques ne peuvent pas nous remplacer ni effectuer notre travail. Seul un œil humain peut détecter les subtilités et les nuances entre chaque prise. Le métier de scripte n’a pas changé et ne changera sans doute pas.
SELON TOI, QUELLE EST LA FORCE DE L’INDUSTRIE AUDIOVISUELLE AU QUÉBEC ?
J’ai beaucoup travaillé avec le réalisateur Roland Emmerich qui m’a dit à plusieurs reprises que les techniciens québécois sont de vrais artistes. Il trouve que leur motivation est nourrie par la passion et que cet enthousiasme se fait rare ailleurs dans le monde. Je suis du même avis que lui, les artisans d’ici sont qualifiés et ont un amour profond pour le cinéma et l’art. Ça se voit et ça se sent !
On commence aussi à voir de plus en plus de québécois en position d’autorité sur des productions américaines. C’est bon signe, cela signifie que les réalisateurs et les producteurs reconnaissent notre talent et nous font confiance.